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Zone Fantastique
12 décembre 2010

The Midnight Meat Train, le dernier train de la nuit

UnknownThe Midnight Meat Train

de

Ryûhei Kitamura

(2008)

Scénario: Jeff Buhler

Avec: Bradley Cooper, Leslie Bibb, Vinnie Jones, Roger Bart, Brooke Shields...

Photographie: Jonathan Sela

Montage: Toby Yates

Musique: Johannes Kobilke et Robb Williamson

 

 Sorti il y a deux ans dans un circuit quasi confidentiel après un passage remarqué par la case Géradmer, The Midnight Meat Train, est une adaptation du Train de l'abattoir, la seconde nouvelle du premier des Livres de Sang de Clive Barker ici producteur. Un texte concis, d'abord ancré dans un réalisme glauque et graphique, avant une chute dérivant vers le surnaturel et les mondes interlopes qu'affectionne tant l'auteur anglais. Cette adaptation confié à Ryûhei Kitamura découvert avec le très barré Versus, scénarisée par Jeff Buhler, auteur/réalisateur d'Insanotorium un obscur direct to dvd, respecte les grandes lignes de l'intrigue littéraire. Le héros, Leon (Bradley Cooper un photographe menant une vie assez modeste avec sa fiancée Maya (Leslie Bibb) serveuse dans un bar-restaurant, entame une série de photos sur la décadence urbaine, l'autre visage de la grande ville, ce poussé par une galeriste de renom (Brooke Shileds). Un soir son chemin croise celui d'un étrange usager, Mogahany (Vinnie Jones) au look d'hommes d'affaires et à la carrure d'équarisseur. Fasciné par ce voyageur, dont il pressent qu'il est sans doute lié à une série de disparitions, Leon s'engouffre sur ses traces. Le réalisateur et le scénariste réajustent la fascination pour le mal présente dans le texte de Barker, en la mettant en perspective avec le voyeurisme, ainsi que le goût de l'art pour le sordide. La quête poursuivie par Leon le conduit ainsi à explorer une partie de sa personnalité, son attirance pour l'horreur jusqu'alors filtrée par ses photographies protectrices, commises au nom noble de l'art, derrière lesquelles il va passer pour se retrouver face à une violence qu'il avait jusqu'à présent esquivée. Ce qui se joue dans son parcours, prendra la forme du conflit entre la civilisation de l'être et ses tendances sauvages, ancestrales voire inconnues qui prennent vie dans les dernières minutes conformes à aux ultimes paragraphes de la nouvelle. Dès lors passé de l'autre côté de la ville, dans ses entrailles les plus profondes, Leon en ressortira en homme neuf, à la fois infirme et plus puissant. Ce récit captivant de la déchéance d'un homme, conclue in fine par une renaissance, tient le spectateur en haleine durant toute la durée du long métrage. Les baisses de régime et les raccourcis (le personnage central retrouve aisément la trace de celui qu'il suit), n'y font rien, on a beau connaître le dénouement on reste, attendant qu'elle sera la fin de parcours réservée au personnage campé avec talent par Bradley Cooper.

  Les faiblesses émanent davantage du traitement adopté par Kitamura. Le parti pris du gore, fidèle au style de l'écrivain s'avère logique, malheureusement il se traduit à l'écran par des scènes sanglantes composées en CGI (images de synthèses) dénuées de force viscérale par la faute de trucages numériques confinant au cartoonesque. Les effets sont beaux, bien faits, il leur manque cela dit une réelle brutalité, une sècheresse. Il en résulte que les moments où le tueur passent à l'acte y compris dans le duel qui l'oppose à un passager aussi costaud que lui (étrange au premier abord il trouve sa justification narrative dans le final), ne suscitent ni implication viscérale du spectateur, ni terreur. Ils évoquent bien davantage un cahier des charges remplis, celui des meurtres, inventifs dans les détails (les partis du corps découpés), ennuyeux à la longue. Ce grief enlève au long métrage de son glauque, le rend plus lisse, ce alors que l'atmosphère entourant les personnages, traduite par des éclairages stylisés, se veut déliquescente à souhait. Dommage également, car les apparitions du tueur à l'arrière plan donne la chair de poule, rappelant celles de Michael Meyers dans le chef d'oeuvre de Carpenter. D'ailleurs, il s'en faut de peu que le menaçant Mogahany n'acquiert une stature d'icône du cinéma de genre, à équidistance de Leatherface (dans une version urbaine civilisée) et de Michael Meyers (même mutisme, même froideur sans pitié). S'il n'atteint jamais ce statut iconique, c'est bien sûr parce que ses actes sont amoindris par la mise en scène, mais aussi car le film dépasse cette idée, redonnant à ce tueur une dimension humaine tragique, celle d'un homme pris dans un piège, simple exécutant en bout de course. La révélation finale agit d'abord sur le criminel, révélant la vraie nature de ce tueur, puis celle de son successeur. Dénué de son inclinaison au grotesque constant chez Kitamura, et de son traitement trop lisse de la violence qui ne devient âpre que dans les décisives dernières minutes, The Midnight Meat Train à l'esthétique classieuse, doublé d'un récit aux terminaisons fascinantes auraient pu devenir un classique instantané du cinéma d'horreur. En l'état il se situe dans le haut du panier de la production horrifique américaine actuelle. 

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